Les pompières et pompiers de partout au Québec sont appelés à répondre à des urgences dans toutes sortes d'environnements, notamment à proximité d'un plan d'eau ou directement sur l'eau. Jusqu'à tout récemment, ils ne se posaient pas la question : ils endossaient presque toujours leur habit de combat incendie, le fameux bunker suit, pour faire une intervention. C'est normal, car ce vêtement de protection leur est essentiel.
Cette façon de procéder est toutefois en voie de changer puisqu'elle les expose à des risques importants relativement à la flottabilité de ces vêtements. C'est ce qu'a démontré la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) dans le cadre de tests réalisés avec la participation de trois pompiers du Service de protection contre l'incendie de la Ville de Québec.
Avec tout le matériel et les témoignages recueillis à l'occasion de ces tests, la CNESST a produit une capsule de formation destinée aux acteurs du domaine de la prévention des incendies. Cette vidéo circule également dans différentes écoles de pompiers à des fins pédagogiques.
Les résultats de l'expérience sont sans équivoque : le bunker suit ne devrait pas être porté lors d'interventions sur l'eau ou dans l'eau. Non seulement il ne flotte que quelques minutes, mais une fois gorgé d'eau, il devient lourd et encombrant, ce qui expose ainsi les travailleuses et les travailleurs à des risques de noyade et les place en position de victimes à sauver. À proximité de l'eau, c'est-à-dire à moins de deux mètres de l'eau, et en contexte d'inondation, le port d'un vêtement de flottaison individuel (VFI) est obligatoire.
L'expérience en bref
Les tests de flottabilité ont été réalisés au Centre de formation en mesures d'urgence de Lévis. Ils ont été effectués dans un environnement très contrôlé, c'est-à-dire dans un bassin d'eau calme, claire et chauffée, et en présence d'une sauveteuse, d'un plongeur et d'inspecteurs de la CNESST.
Plusieurs éléments ont été analysés lors de la quinzaine de scénarios. Les pompiers participants sont notamment allés à l'eau en habit de combat incendie complet, ou encore en salopette et chaussés de bottes. L'efficacité du port d'une veste de flottaison individuelle et d'un appareil de protection respiratoire isolant autonome a aussi été vérifiée. Enfin, la CNESST a observé la capacité des pompiers à se hisser hors de l'eau par eux-mêmes, en portant un habit de combat incendie, à la fois en bord de bassin et dans un bateau pneumatique.
Les pompiers participants ont également été pesés, avec leur habit de combat incendie sec, et en habit de combat une fois sortis de l'eau. Les résultats démontrent qu'ils pesaient en moyenne 34 kg (75 livres) de plus, une fois mouillés.
Ultimement, ces tests permettent de conclure que l'habit de combat incendie n'est pas l'équipement adapté pour faire du sauvetage nautique parce qu'il n'a pas les caractéristiques nécessaires pour ce genre d'interventions, et ce, même dans un environnement contrôlé ne recréant pas les difficultés liées à une intervention réelle (eau froide, vagues, courant, obscurité, état de stress, de panique ou de fatigue).
Citations
« Improviser une opération de sauvetage aquatique est dangereux et peut placer l'intervenant en position de victime. Les pompières et pompiers appelés à intervenir près de l'eau ou lors d'inondations doivent bénéficier de la formation et des bons équipements pour le faire. À cet effet, je salue la réalisation des tests de flottabilité de l'habit de combat incendie effectués par la CNESST et ses partenaires. De telles initiatives communes permettent de faire progresser la santé et la sécurité du travail et de réduire le nombre d'accidents et de lésions professionnelles. »
Jean Boulet, ministre du Travail et ministre responsable de la région de la Mauricie, de la région du Nord-du-Québec et de la région de l'Abitibi-Témiscamingue
« L'amélioration continue des méthodes de travail et la mise en commun des expertises et des connaissances sont des voies à privilégier pour assurer des milieux de travail toujours plus sains et sécuritaires. C'est dans cette optique que nous avons cherché à déterminer la flottabilité de l'habit de combat incendie lors d'interventions à proximité de l'eau. Je remercie tous nos partenaires et j'espère sincèrement que cette expérience pourra contribuer à susciter des réflexions et des conversations importantes en matière de santé et de sécurité au travail chez les pompières et les pompiers. »
Anouk Gagné, présidente-directrice générale de la CNESST